Dans cette section, nous présenterons différents statuts de protection territoriale; au niveau communautaire, provincial, fédéral et international. La distinction entre ces niveaux est importante dans le contexte législatif canadien, car chacun d’eux a ses propres statuts et ses propres logiques patrimoniales. Par logique patrimoniale, nous entendons les critères pour qu’un territoire ou un lieu soit reconnu assez important pour valoir un statut de protection. Certains des porteurs de projets valorisés dans ce site ne répondent pas au cadre légal canadien pour plutôt valoriser une perspective de protection territoriale à même les philosophies de leurs communautés. Ils relèvent donc complètement d’une autre vision du patrimoine.
Dans le cadre légal canadien et extragouvernemental, par exemple à l’UNESCO, le patrimoine est généralement divisé en deux catégories : le patrimoine naturel ou culturel. Bien sûr, ces deux catégories sont aussi divisées en sous-catégories en fonction de ce que l’on souhaite protéger : une plante, un animal, un écosystème, un récit, un monument, un objet, etc. Certains statuts, qui répondent à une logique de protection du patrimoine naturel, peuvent aussi servir à protéger des éléments patrimoniaux culturels quand ceux-ci sont liés. Un bon exemple (voir plus bas) est le statut provincial au Québec de « réserve de territoire aux fins d’aire protégée ».
Ces différentes logiques patrimoniales sont présentées ici dans une tentative de faciliter le repérage de lois ou statuts qui peuvent convenir à la protection de lieux importants ou de territoires pour les peuples autochtones.
Considérant la démarche des statuts de protections à différents niveaux, nous nous concentrerons sur des exemples de protection en explicitant le statut, la marche à suivre pour l’obtenir, les lois qui l’ont créé et les liens utiles pour obtenir plus d'informations pouvant mener à l'obtention d’un sceau de protection officielle.
Nous vous invitons aussi à voir dans votre région quel statut est possible selon le contexte légal.

Ce statut implique à la fois une vision de protection du patrimoine naturel et du patrimoine culturel. Il a pour objectif principal de créer des espaces de protection, de contact, d’appréciation et de développement durable d’un territoire donné. Les réserves de biosphère sont créées par l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO) dans le cadre de son Programme sur l’Homme et la Biosphère (MAB). Chaque réserve Biosphère est divisée en 3 sections : une aire principale qui est un espace de protection et de conservation stricte; des zones tampons qui sont principalement utilisées pour des activités considérées compatibles avec la préservation du milieu (éducation, formation, etc.); et enfin une zone de transition qui est davantage associée au développement économique et socioculturel.
Nomination : Selon le site du MAB, voici comment postuler
- Pour demander le statut de Réserve de biosphère, remplir le Formulaire de proposition de réserve de biosphère ou le Formulaire de proposition de Réserve de biosphère transfrontière
- Formulaire d’examen périodique des réserves de biosphère (FR)
- Le Comité consultatif international sur les réserves de biosphère (CCIRB) étudiera les propositions de désignation de réserves de biosphère pour recommandation au Conseil international de coordination (CIC).
- Le CIC prendra sa décision et le directeur général de l’UNESCO en informera l’État concerné.
Durée : temporaire, doit être renouvelé à tous les 10 ans.
Liens utiles :
Réseau réserve Biosphère Mondial
Réseau réserve Biosphère Canada

Ce statut reconnait à des lieux ou à des zones le caractère de patrimoine mondial, il peut s'agir d'un site naturel, d'un site culturel ou d'un site mixte. La Convention pour la protection du patrimoine mondial définit ainsi un site culturel : « œuvres de l'homme ou œuvres conjuguées de l'homme et de la nature, ainsi que les zones y compris les sites archéologiques qui ont une valeur universelle exceptionnelle du point de vue historique, esthétique, ethnologique ou anthropologique ». La convention définit un site naturel comme : « ayant une valeur universelle exceptionnelle du point de vue de la science, de la conservation ou de la beauté naturelle. »
Nomination : Les lieux admissibles pour ce statut doivent déjà être reconnus par le pays pour son caractère patrimonial exceptionnel. Au Canada, il faut que le lieu soit déjà reconnu au niveau provincial puis fédéral pour pouvoir postuler. L’une des premières étapes est d’être sélectionné dans la liste indicative des sites patrimoniaux potentiels comme c’est le cas pour la Stein Valley en Colombie-Britannique. Pour le détail du processus de nomination, suivre ce lien.
Durée : permanent
Liens utiles :
Convention concernant la protection du patrimoine mondiale culturel et naturel
Ligne du temps des démarches pour l’acquisition du statut par Pimachiowin Aki

Parc national et réserve de parc national
Le statut de parc national protège le patrimoine naturel d’un lieu où d’une zone précise pour permettre à la population et aux générations futures d’en bénéficier. Cependant, quand un peuple autochtone revendique des droits ancestraux sur tout ou une partie du territoire d’un projet de parc et que le gouvernement fédéral a accepté d’engager des négociations à cet égard, la zone est qualifiée de Réserve de parc national. La grande différence est que la réserve de parc permet la continuation d’activités qualifiées de traditionnelles comme la chasse ou la cueillette de certaines plantes, ce qui n’est pas permis dans un parc national.
Nomination : Pour devenir un parc national ou une réserve de parc, il faut d’abord qu’un lieu ou une zone soit reconnu localement comme aire naturelle représentative pour ensuite être considéré comme parc national. Pour le processus, suivre ce lien.
Pour ce qui est de la réserve, il faut que cela corresponde aux critères pour un parc national en plus de faire l’objet d’une revendication d’un peuple autochtone reconnu comme valable par le gouvernement fédéral dans le cadre de négociations territoriales.
Durée : permanent
Liens utiles :
Processus de création d’un parc national

Ce statut est le seul statut au niveau fédéral qui assure une protection permanente d’un lieu (et non d’une zone) en raison de son patrimoine culturel ou historique. Selon la loi, un tel lieu est défini comme suit : Emplacement, bâtiment ou autre endroit d’intérêt ou d’importance historique nationale, y compris les bâtiments ou ouvrages qui sont d’intérêt national en raison de leur âge ou de leur architecture. Un exemple est T'äw Tà'är qui a été reconnu lieu historique comme point central dans les chemins assurant la continuation généalogique du peuple Athapascans du Yukon.
Nomination : Selon le lieu, la demande doit être effectuée auprès du ministère de l'Environnement et du Changement climatique et de commission des lieux et monuments historiques du Canada.
Durée : permanente
Lien utile :

Ce statut tente de protéger le patrimoine naturel et a été créé selon la Loi sur la conservation du patrimoine naturelle est attribué par le gouvernement québécois sur des terres considérées publiques selon des motifs variables. Par exemple en 2020, le gouvernement a utilisé ce statut pour protéger le site du Mushuau-nipi et la population de caribou de la région en justifiant le caractère culturel important pour le peuple innu (voir le lien suivant).
Nomination : La demande doit être faite directement au ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques selon les orientations gouvernementales en vigueur au moment de la demande. Ce sont des mémoires de ce même ministère qui approuvent les nouvelles réserves.
Durée : Permanente ou jusqu’à l’obtention du statut d’aire protégée.

Parcs Provinciaux
Ce statut de protection sert généralement à protéger le patrimoine naturel d’une zone ou d’un lieu pour sa diversité biologique, tout en le rendant accessible à des fins éducatives et récréatives.
Nomination : Selon la province, le processus implique de faire reconnaître au gouvernement provincial le caractère exceptionnel du patrimoine naturel, de la faune et de la flore. Toujours en fonction de la province, il faut généralement faire la demande au ministère responsable des parcs.
Durée : permanent
Liens utiles :

Ce statut désigne les aires de protection territoriale dont l’élaboration et la gestion sont assurées par les communautés autochtones. Ainsi ces statuts sont mis en œuvre et appliqués par les communautés elles-mêmes en fonction des besoins et des spécificités des lieux ou des territoires ciblés. Le gouvernement fédéral reconnait de plus en plus ces aires de protection pour les inclure officiellement dans le registre des aires protégées canadiennes et offre des fonds pour faciliter leur création, bien que plusieurs de ces aires ne soient pas encore officiellement reconnues par les gouvernements.
Nomination : initiative de gestion locale
Liens utiles :
Liste des APCA reconnus par le gouvernement
Programmes fédéraux pour le leadership et les initiatives autochtones
Programme gardiens autochtones du territoire
Fonds autochtone pour les espèces en péril
Guide du Cercle autochtone d’experts pour la protection de la biodiversité

Ce statut n’est pas un statut de protection, mais bien un statut de reconnaissance juridique. Cela implique que des éléments considérés naturels, comme par exemple une rivière, peuvent se voir reconnaître le statut d’individu moral au sens de la loi. Cela implique que la rivière aura des gardiens et gardiennes locaux qui assurent que les droits de la rivière soient reconnus. Ce statut n’est pas reconnu officiellement par le cadre législatif canadien, mais permet à des communautés locales de se doter d’un cadre clair face à ce qui peut être reconnu, comme c’est le cas de la rivière Magpie avec la communauté innue d’Ekuanitshit.
Nomination : initiative de gestion locale
Durée : permanente
Liens utiles :

Il existe également des statuts légaux qui ne s’apparentent pas à la protection territoriale, mais qui peuvent en avoir l’effet.
Un exemple selon le cadre légal du Québec est un titre minier communément nommé claim. Un claim est un titre d’exploration minière selon la loi sur les mines du Québec qui donne « le droit exclusif de prospection en vue de découvrir des minéraux » (art.53.1b). Si un claim est apposé sur une superficie pour prospection, son titulaire n’a toutefois aucune obligation de faire de la prospection. Le groupe des gardiens du territoire Upashkuss a obtenu d'un titulaire de claim une garantie qu’il ne l’utiliserait pas.
En ce sens, comme le droit sur un claim est exclusif, la superficie du claim est protégée. Il y a bien sûr des limites à ce genre de protection, notamment qu’elle est temporaire et repose sur la parole du titulaire.
Par cette catégorie, nous voulons montrer qu’il existe plusieurs statuts légaux qui peuvent potentiellement être mobilisés à des fins de protection territoriale.
Lois sur la protection du patrimoine culturel
Québec
https://www.legisquebec.gouv.qc.ca/fr/document/lc/P-9.002
Colombie-Britannique
https://www.bclaws.gov.bc.ca/civix/document/id/complete/statreg/96187_01
Alberta
https://www.alberta.ca/heritage-conservation-protection.aspx
Manitoba
https://web2.gov.mb.ca/laws/statutes/ccsm/h039-1e.php
Nouveau-Brunswick
https://www2.gnb.ca/content/gnb/en/departments/thc/heritage/content/heritage_conservationact.html
Nouvelle-Écosse
https://nslegislature.ca/sites/default/files/legc/statutes/heritage.htm
Ontario
https://www.ontario.ca/laws/statute/90o18
Terre-Neuve – Labrador
https://www.assembly.nl.ca/legislation/sr/statutes/h04.htm
Île-du-Prince-Édouard
https://www.princeedwardisland.ca/sites/default/files/legislation/h-03-1-heritage_places_protection_act.pdf
